Les mitsvot ou l’épreuve morale

«Tous les préceptes que je vous impose en ce jour, ayez soin de les suivre, afin que vous viviez et deveniez nombreux quand vous serez entrés en possession de ce pays que l’Ét’ernel a promis par son serment à vos pères. Tu te rappelleras cette traversée de quarante ans que l’Ét’ernel, ton D’ieu, t’a fait subir dans le désert afin de t’éprouver par l’adversité, afin de connaître le fond de ton coeur, si tu resterais fidèle à ses lois, ou non. Oui, il t’a fait souffrir et endurer la faim, puis il t’a nourri avec cette manne que tu ne connaissais pas et que n’avaient pas connue tes pères; pour te prouver que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais qu’il peut vivre de tout ce que produit le verbe du Seigneur(1)

Après le rappel de la récompense promise pour l’obéissance aux lois divines, Êqèv décrit également les avantages assurés au peuple d’Israël s’il se conforme à la volonté de D’ieu. Bien souvent, par le passé, Israël fut témoin de prodiges réalisés par D’ieu afin de lui garantir protection et existence.

En se basant sur la loi du nombre, Israël n’aurait jamais pu venir à bout de tous les peuples qu’il doit combattre. Et pourtant, la présence divine, Sa sollicitude et Ses bonnes dispositions agissent de telle sorte qu’ils sont tous à sa merci. D’ieu les livre à Israël. «Pas un ne te tiendra tête, de sorte que tu les extermineras tous(2)

Cependant, D’ieu recommande en retour de détruire les divinités de ces peuples, de ne pas céder à la tentation de garder l’argent ou l’or qui les couvre afin de ne point s’attirer quelque malheur. Car «[cet or] est en abomination à l’Ét’ernel, ton D’ieu(3)

La destruction des idoles correspond à l’accomplissement de toutes les mitsvot. La protection divine dure tant qu’Israël applique cette prescription. Ce faisant, le texte le considère comme ayant accompli toutes les prescriptions de la Tora.

Le Midrache(4) abordant le texte(5) :

«Tous les préceptes que je vous impose en ce jour, ayez soin de les suivre afin que vous viviez et deveniez nombreux…» rapporte : c’est bien ce qu’affirme l’Écriture(6) :

«Car [les préceptes] sont un gage de vie pour qui les accueille, un gage de santé pour tout le corps.» Ainsi quiconque trouve les paroles de la Tora trouve-t-il en fait la vie tel qu’il est écrit : «Car ils sont un gage de vie pour qui les accueille

Autre explication.

«Car ils sont un gage de vie pour qui les accueille», autrement dit lé-motsièhèm, , pour qui les enseigne à d’autres. Un homme ne peut enseigner les paroles de la Tora que s’il découvre leur raison essentielle. Ainsi dit Mochè : lorsque vous étudiez la Tora, tâchez de l’épuiser entièrement. Aussi est-il dit : «Tous les préceptes que je vous impose en ce jour, ayez soin de les suivre afin que vous viviez.» C’est ce qu’affirme le texte(7) :

«Mon fils, puisses-tu accueillir Mes paroles, te pénétrer de Mes recommandations.» Rabbi Abba, fils de Kahana, enseigne : quand mériteras-tu d’être «Mon fils»? Lorsque «tu accueilleras Mes paroles!» Il est dit aussi(8) :

«Vous êtes les enfants de l’Ét’ernel, votre D’ieu.» Quand serez-vous Ses enfants? Lorsque vous appartiendrez à l’Ét’ernel, votre D’ieu, en observant Ses commandements. Aussi est-il écrit «Mon fils, puisses-tu accueillir Mes paroles!». Mon fils, tu accueilleras Mes paroles si tu en as le mérite.

Autre explication.

Prends soin de Ma Tora tel cet homme qui possède une perle. Ainsi puisses-tu t’investir dans la Tora pour accomplir «te pénétrer de Mes commandements.» Rabbi Abba, fils de Kahana, dit : Ceci fait penser à un homme qui, ayant une fille adulte, voulait la marier au premier venu. Il n’en est pas ainsi pour la Tora, si tu as quelque mérite, tu la possèderas et tu te pénètreras de Mes recommandations.»

Le midrache met l’accent sur le but véritable que doit viser toute étude de la Tora. L’étude, pour être valable, doit satisfaire certaines exigences.

Tout d’abord, l’application faisant appel à la participation de tous les sens et organes. Car une étude silencieuse est vouée à l’oubli. Pour bien l’enregistrer, il est nécessaire de bien prononcer, articuler tous les mots afin qu’ils s’impriment dans toutes les fibres de son être.

En articulant à voix haute, il y a conjugaison de tous les organes de prononciation allant de la gorge aux lèvres en passant par le palais, la langue et les dents. L’ouïe intervient également pour exercer la mémoire auditive. Aussi, pour cette raison, est-il dit dans Michelè : «Car ils sont un gage de vie pour qui les accueille». Le midrache ne lit pas lé-motséèhèmpour qui les accueille, mais lé-motsièhèmpour qui les prononce.

Le fait de prononcer augmente les chances de retenir son étude. L’étude est un gage de vie pour qui s’en souvient et non pour qui étudie sans y investir des efforts. Une telle étude est vouée à l’oubli certain mais aussi à la privation de toutes les chances de vie. La Michena(9) enseigne :

«Rabbi Dostaï, fils de Yannaï, disait au nom de Rabbi Méir : Celui qui oublie ce qu’il a appris compromet sa vie, car il est dit(10) :

«Garde-toi bien, pour ton salut, d’oublier les choses que tes yeux ont vues.» Mais cela s’applique-t-il aussi à celui qui oublie parce qu’il n’a pas bien compris? Non, car l’Écriture ajoute :

«Que ces choses ne sortent jamais de ton coeur.» Ainsi l’on n’est coupable que lorsqu’on les oublie par une négligence volontaire.»

Or, négligence volontaire c’est surtout une étude entreprise sans la participation des organes d’articulation, de l’ouïe et des membres. Une lecture intériorisée restant au niveau de la pensée, sera vouée, par conséquent, à l’échec car, n’étant pas active et articulée, elle ne sera pas réalisable.

Chémouèl recommandait au nom de ce principe à Rav Yéhouda, son disciple(11) :

«Ouvre la bouche et lis, prononce bien et étudie afin que tu puisses bien assimiler ton étude et que tes jours soient prolongés…»

Par ailleurs, la Michena(12) affirme :

«C’est une excellente chose que l’étude de la Tora, car elle donne à ceux qui s’y livrent la vie de ce monde et la vie éternelle dans le monde futur, ainsi qu’il est écrit(13) :

«Ils sont une source de vie pour qui les trouve [les accueille] et un remède [gage de santé] pour le corps

Mais il ne suffit point de faire une étude active et articulée. Il faut en outre s’appliquer à en dégager le sens profond. Pour ce faire, l’étude devrait être entreprise dans l’intention de l’enseigner.

En effet, c’est à travers l’enseignement que l’on arrive à cerner le véritable sens du texte. Car un texte que l’on ne saurait point expliquer aux autres sera d’autant plus obscur pour soi. L’effort de clarification que l’on met à la disposition de l’élève, aide à comprendre la Tora.

L’étude de la Tora requiert également la mise en pratique. L’étude théorique est une étude qui, n’ayant pas un intérêt, s’avèrerait inutile et peu attrayante. En revanche, elle gagne beaucoup à déboucher sur la pratique. Déjà, mettre en pratique ne peut se réaliser sans une compréhension profonde du texte.

Par ailleurs, la mise en pratique augmente les capacités de retenir et garder en mémoire aisément son étude. La véritable étude est par définition celle entreprise dans l’intention d’être mise en pratique.

Rabbi Yichemaêl enseigne(14) :

«Quiconque étudie la Tora pour l’enseigner parvient à s’y instruire et à l’enseigner, et celui qui l’étudie pour l’accomplir parvient à s’y instruire, à l’enseigner et à l’accomplir.»

Aussi le texte précise-t-il : «Tous les préceptes que je vous impose en ce jour ayez soin de les suivre afin que vous viviez…» La condition première est bien de suivre, de mettre en pratique. Une telle étude procure vie et bonheur.

La mise en pratique des mitsvot constitue donc la raison d’être d’Israël qui, pour mériter d’être «le fils» de D’ieu, se doit de garder scrupuleusement Ses recommandations. C’est bien l’enseignement de Rabbi Abba, fils de Kahana. Une perle dont on ne prendrait pas soin se perdrait. Elle ne perd jamais, il est vrai, sa valeur propre. Mais le perdant est celui qui n’a pas investi les efforts nécessaires pour la garder et la tenir en sa possession.

La Tora est la fille de D’ieu. S’il a voulu la donner à Israël, ce n’est sûrement pas en vue de s’en débarrasser comme le père qui, voyant sa fille adulte vieillir, est prêt à la donner pour femme au premier venu.

En revanche, Israël doit faire preuve de mérite exceptionnel. Il s’agit surtout de montrer une disposition à prendre soin de toutes les prescriptions de D’ieu, de les mettre en pratique, pour que D’ieu consente à lui transmettre la Tora.

afin que vous viviez et deveniez nombreux quand vous serez entrés en possession de ce pays de l’Ét’ernel promis par son serment à vos pères.

Tous les préceptes que je vous impose en ce jour,

Rabbènou Béhayè établit un lien entre ce verset et le texte précédent qui parle de la destruction des idoles.

Il rappelle à cet effet l’enseignement du Talmoud(15) :

«Quiconque renie l’idolâtrie est considéré comme adhérant à toute la Tora et, au contraire, celui qui adhère à l’idolâtrie, comme s’il a renié toute la Tora.»

De plus, l’emploi de Kol ha-mitsvatoute la mitsva, s’explique selon le Tanhouma(16), par le fait que la mitsva n’est accomplie que si elle est faite dans son intégralité.

«Ainsi, quiconque commence à réaliser une mitswa se doit de l’achever, car la mitsva n’est attribuée qu’à celui qui l’achève. C’est ainsi que dit le texte(17) :

«Quant aux ossements de Yossèf que les enfants d’Israël avaient emportés d’Égypte, on les inhuma à Chèkhèm…» N’est-il point vrai que Mochè fut le seul à s’être occupé de les emporter? Mais, parce qu’il n’eut pas le temps de mener à bonne fin la mitsva et qu’Israël l’a achevée, elle leur fut attribuée.»

Or ha-Hayim s’interroge sur l’emploi du singulier «toute la mitsva». Après avoir recommandé d’obéir à tous les préceptes divins, quelle serait donc cette mitsva particulière qui, en la faisant, octroie en récompense la vie, les enfants et tout le bonheur?

Mochè, dit-il, exhorte Israël pour éviter l’erreur toujours possible consistant à négliger certaines mitsvot pensant qu’elles sont de moindre importance. Cette négligence est la cause principale des souffrances et misères. La Tora représente, au contraire, un monument, une entité. Il faut la réaliser dans son intégralité. Cela est absolument essentiel car l’existence en dépend.

Le Zohar(18) rappelle que le corps de l’homme se compose de 248 organes et 365 nerfs. La Tora se compose également de 248 mitsvot âssèdevoirs, et 365 mitsvot lo ta-âssèdéfenses. Et si un homme souffre d’un organe malade, on ne saurait faire taire ses plaintes en lui disant qu’il a encore 247 qui sont intacts. Il en est ainsi pour la Tora : comme le corps de l’homme souffre par la maladie d’un organe, ainsi toute la Tora se trouve altérée par la non-observance d’une mitsva.

Le verset se lit donc comme suit : toute la mitswadans sa totalité, vous l’observerez en ne transgressant pas les défenses, et vous réaliserez les devoirs. Ce n’est qu’en se conformant à la totalité des préceptes qu’Israël mériterait d’avoir en récompense l’existence, la descendance, ainsi que la terre en héritage.

En parlant de l’héritage de la terre de Kénaâne, Mochè fait allusion, quant à lui, ce que lui a valu la désobéissance, à une seule mitswa. Ce faisant, Mochè les encourage à réaliser toutes les mitswot.

Ti-chméroune, vous serez en attente.

Or ha-Hayim avance une seconde explication. L’homme se doit de montrer une parfaite disponibilité face à la mise en pratique des mitswot. Afin de mériter les trois conditions du bonheur : la vie, les enfants et les biens matériels, il est recommandé d’être attentif et prêt à accomplir la mitswa qui se présente. Et ce, contrairement à ce que le Talmoud affirme(19) : «Les enfants, la vie et les moyens d’existence ne dépendent pas du mérite personnel, mais de la disposition des astres.» Car, dit-il, «quiconque tient à la perfection de la Tora et à son intégralité, se trouve au-dessus des astres.» Abraham est un parfait exemple puisque les astres avaient prédit qu’il n’aurait pas d’enfant.

Tous les préceptes que je vous impose en ce jour, ayez soin de les suivre,

Pour Kéli Yaqar, le passage du singulier que je t’ordonneà toi, au pluriel de vous observerezvous tous, s’explique par le principe voulant que le destin du monde, de toute la société, dépend de la bonne volonté d’un seul individu. Car le Tsaddiq, , à lui seul, par sa bonne conduite, assure l’existence au monde. Aussi, pour cette raison, dit-il, «si tu observes la mitswa que je t’ordonne, alors je ferai de telle sorte que vous tous vous viviez…» Bien plus, une seule mitswa, accomplie de manière rigoureuse et scrupuleuse, peut procurer en récompense la vie et le bonheur à tous.

Rabbi Yonatane enseigne(20) : «Guéhinom est réservé à celui qui n’a pas accompli une seule mitswa.» Le fait d’accomplir une mitswa entraîne, il est vrai, la possibilité d’en réaliser d’autres.

Pour Chaâr Bat Rabbim, l’expression «que je t’ordonne», semble être superflu.

Cependant, sa présence se justifie car, dit-il, il peut arriver que l’homme soit enclin à accomplir les mitswot parce qu’elles sont logiques et rationnelles. Afin d’éviter une telle tendance, le texte souligne que l’obéissance aux mitswot a pour raison fondamentale le fait qu’elles émanent de D’ieu, non parce que l’esprit humain les conçoit et les accepte.

Rav Alchèkh tente d’établir un lien entre ce verset et la prescription d’anéantir l’idolâtrie d’une part, et, de l’autre, entre ce verset et les suivants. En effet, quelle est donc la relation entre l’observance de tous les préceptes et le souvenir des quarante années dans le désert ainsi que toutes les épreuves passées?

Pour lui, le fait d’anéantir les divinités ne devrait pas soulever des réserves ni des réticences de la part d’Israël devant la crainte de réduire l’influence bénéfique des astres que représentent ces divinités.

Bien au contraire, en se conformant à l’application de la mitswa dans toute son intégralité, en détruisant complètement ces divinités, on s’attire les récompenses que l’on attribue aux astres. Ainsi la vie, les enfants et les moyens de mener l’existence seront mieux assurés non seulement pour avoir réalisé cette mitswa, mais dès la résolution prise de la réaliser.

Cependant,

Tu te rappelleras cette traversée de quarante ans que l’Ét’ernel, ton D’ieu, t’a fait subir dans le désert, afin de t’éprouver par l’adversité, afin de connaître le fond de ton coeur, si tu resterais fidèle à ses lois, ou non.

Afin de t’éprouver par l’adversité, afin de connaître le fond de ton coeur, si tu resterais fidèle à ses lois, ou non.

Certes, tous les bonheurs de ce monde ne peuvent se maintenir que si l’homme consent à assumer la Tora à partir de l’indigence et des souffrances. Ainsi s’exprime Rabbi Yonatane(21) :

«Celui qui réalise la Tora dans la pauvreté la réalisera dans la richesse, mais celui qui la néglige dans la richesse la négligera dans la pauvreté.»

Pour Kéli Yaqar, «afin de t’éprouver par l’adversité, afin de connaître le fond de ton coeur» donne le véritable sens de l’épreuve.

La réalisation des mitswot malgré l’adversité, l’indigence et les souffrances, constitue l’épreuve moralenissayone. L’assumer pleinement débouche, par la suite, à l’élévation. L’épreuve surmontée, l’homme est hissé sur un étendardnès. Car ainsi D’ieu fait connaître à tous le fond de son coeur.

En effet, le bonheur des Bénè Yisraèl pourrait susciter la jalousie des autres peuples, fils de Yichemaêl et Êssaw, descendants d’Abraham également. Mais le fait d’avoir assumé la Tora malgré les tribulations de quarante ans de désert, malgré les privations, montre aux yeux des peuples autant l’amour de D’ieu pour Israël que l’attachement véritable d’Israël à D’ieu.

Ainsi faut-il comprendre également l’épreuve d’Abraham qui, en sacrifiant son fils, proclame devant tous son amour pour D’ieu qui l’élève.

Mais Mèâm Loêz, s’interrogeant sur le sens de ces épreuves, dit que le séjour dans le désert avait pour but d’extirper toutes les mauvaises dispositions prises en Égypte. Car s’ils avaient conquis le pays de Kénaâne aussitôt après leur délivrance d’Égypte, les Bénè Yisraèl se seraient donnés aux travaux nécessaires à leur subsistance sans avoir eu le temps d’assimiler le sens et les intentions des mitswot.

En revanche, pendant ce séjour, D’ieu les nourrit avec la manne, leur a procuré des vêtements qui ne se sont point usés, ils se sont habitués à la réalisation des mitswot.

Enfin, les Bénè Yisraèl, n’étant pas parfaits, éprouvaient D’ieu par d’autres exigences et demandes. Ce séjour devint nécessaire pour que D’ieu puisse les éprouver à son tour au point de vouloir connaître le fond de leur coeur et de déterminer si leur obéissance était reliée à leurs demandes ou à l’amour qu’ils Lui témoignent. C’est dans le désert qu’en fait les Bénè Yisraèl ont pu constater que leur vie ne tient pas aux seuls aliments mais à la parole divine.

Rambane souligne, quant à lui, la récompense de celui qui accomplit la mitswa dans toute son acception. D’ieu n’abandonne jamais ceux qui lui sont fidèles. La preuve est fournie par les moyens d’existence que D’ieu a assurés à Israël dans le désert, lieu aux conditions pénibles et dures. Aussi, est-ce là le sens de l’épreuve de connaître et faire connaître la grande fidélité d’Israël, sa foi absolue en D’ieu qu’il suit, bien qu’Il ait la possibilité de les conduire en passant par des villes et des lieux d’habitation.

Oui, il t’a fait souffrir et endurer la faim, puisqu’il t’a nourri avec cette manne que tu ne connaissais pas et que n’avaient pas connue tes pères; pour te prouver que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais qu’il peut vivre de tout ce que produit le verbe du Seigneur!

Oui, il t’a fait souffrir et endurer la faim, puisqu’il t’a nourri avec cette manne que tu ne connaissais pas et que n’avaient pas connue tes pères;

D’ieu décide de faire souffrir Israël et lui fait endurer la faim pour qu’ensuite il le nourrisse avec la manne.

La souffrance consiste, pour Rambane et Rabbènou Béhayè, à leur faire traverser le désert tel qu’il est dit(22) : «Il a épuisé, dans la marche, ma vigueur, il a abrégé mes jours.»

La faim consiste dans la privation de moyens d’existence ainsi qu’il est dit(23) : «Tandis que vous nous avez amenés dans ce désert, pour faire mourir de faim tout ce peuple!»

Mais aussitôt après, D’ieu leur procure la manne, la nourriture céleste, que même Abraham n’a pas connue malgré la confiance absolue qu’il a témoignée à D’ieu. Tout cela avait pour but précis de montrer que ce n’est point de pain que vit l’homme, mais de tout ce que produit la parole divine.

Or ha-Hayim signale les qualités exceptionnelles de la manne qui, malgré la marche pénible du désert et la faim par manque de nourriture dans le désert, deux conditions provoquant à la fois perte de forces physiques ainsi qu’affaiblissement du système digestif, procure à Israël la nourriture idéale destinée au souffrant et à l’affamé.

Les aliments peuvent être de deux sortes : certains sont permis à la fois au malade comme au sain, parce qu’ils sont raffinés et purs; mais d’autres ne peuvent être supportés que par le sain et non par le malade. La manne est cette nourriture capable de restaurer le faible comme le fort, le malade comme le sain.

Cependant, la manne elle-même, nourriture des anges célestes, constituait également une épreuve pour Mèâm Loêz. Chaque jour, il fallait attendre que la manne tombe. Ce fait, à lui seul, peut provoquer la faim car, disent nos Maîtres(24) : «Celui dont le panier est plein de pain [ne souffre pas] autant que celui dont le panier ne contient pas de pain.» Celui-ci souffre car le manque provoque une angoisse telle qu’il n’est jamais rassasié.

Mais D’ieu avait pour objectif essentiel, par ces épreuves, de planter dans le coeur d’Israël la foi et la confiance en Lui. L’existence en Èrèts Yisraèl exige que le peuple passe par un tel apprentissage. Elle obéit plus au miracle qu’aux lois naturelles. Aussi, pour cette raison, doit-il faire preuve d’obéissance et fidélité aux prescriptions divines.

1. Dévarim 8, 1-3.

2. id. 7, 24.

3. Dévarim 7, 25.

4. Tanhouma sur Êqèv paragr. 5.

5. Dévarim 8, 1.

6. Michelè 4, 22.

7. Michelè 2, 1.

8. Dévarim 14, 1.

9. Avot 3, 10.

10. Dévarim 4, 9.

11. Êroubine 54a.

12. Avot 6, 7.

13. Michelè 4, 22.

14. id. 4, 6.

15. Chévouôt 29a.

16. in Êqèv chap. 6.

17. Yéhochouâ 24, 32.

18. cf. Vol. 1, 109b.

19. Moêd Qatane 28a.

20. Sanhèdrine 111a.

21. Avot 4, 9.

22. Téhillim 102, 24.

23. 0 Chémot 16, 3.

24. Yoma 74b.

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