Paroles de Mochè à Israël

«Ce sont là les paroles que Mochè adresse à tout Israël en deçà du Yardène, dans le désert, dans la plaine en face de Souf, entre Parane et Tofèl, Labane, Hatsèrot et Di zahab. Il y a onze journées depuis Horèv, en passant par le mont Sèîr, jusqu’à Qadèche Barnèâ. Or, ce fut dans la quarantième année, le onzième mois, le premier jour du mois, que Mochè redit aux enfants d’Israël tout ce que l’Ét’ernel lui avait ordonné à leur égard. Après avoir défait Sihone, roi de l’Émori, qui résidait à Hèchbone et Ôg, roi du Bachane, qui résidait à Âchetarot et à Èdrèî(1)

Avec la Dévarim, débute le cinquième livre de la Tora, appelé aussi Michenè Toradeuxième Tora, en raison de la reprise des prescriptions de la Tora faite par Mochè, peu avant sa mort.

Mochè convoque tout Israël pour reprendre l’enseignement de la Tora, la date est clairement indiquée. Il s’agit du premier du mois de Chévat, autrement dit 36 jours avant la mort de Mochè. Or ha-Hayim trouve une allusion à ce nombre de jours dans l’emploi de èllèvoici, premier mot de Dévarim, dont la valeur numérique est justement 36.

Cependant, Mochè passe en revue également tous les événements qui avaient affecté les rapports d’Israël avec D’ieu, d’une part, et les rapports d’Israël avec Mochè, d’autre part. Il adresse d’ailleurs, pour la première fois et, qui plus est, avant sa mort, des reproches qui marquent Israël.

Il est tout à fait remarquable que plusieurs de ces reproches n’ont été faits que sous forme d’allusion afin de ménager la susceptibilité des Bénè Yisraèl. Mochè vise surtout à obtenir des résultats positifs.

Le propre de la remontrance est de chercher plus à corriger la conduite des personnes, plutôt que de vouloir se réjouir de leur échec ou de leurs défauts et travers, de réparer enfin les errements de son environnement social.

Certes il est une obligation, un devoir pour chacun de redresser les torts de ses semblables, d’éviter l’indifférence devant le spectacle du mal qui se déroule devant ses yeux car tout le peuple d’Israël est lié par des liens de solidarité. C’est pour cette raison qu’il appartient à chacun, selon ses moyens et ses facultés, de corriger le comportement moral de sa famille, ses amis ou tout simplement de tout juif.

Nous sommes tous solidaires, embarqués sur un bateau selon Rabbi Chimône Bar Yohaï(2). Il serait impensable d’assister sans réagir au burinage de la coque du bateau par l’un des voyageurs qui, sous prétexte d’avoir payé sa place, invoquerait la liberté d’en disposer au point de la perforer. C’est sûr qu’en le laissant faire tout le bateau serait en danger. Il en est ainsi des Bénè Yisraèl qui, par les liens de solidarité agissante, deviennent tous responsables les uns des autres.

Aussi le midrache(3) sur cette sidra tient-il à souligner l’action bienfaisante de Mochè qui parce qu’il adresse des reproches à Israël montre en réalité combien son amour est grand pour son peuple. Ce qui est tout à fait le contraire pour Bil’âm qui, plutôt que de fustiger Israël par ses reproches, tend à les endormir par ses bénédictions et flatteries.

Le Yalqout rapporte :

«Il est écrit(4) :

«Celui qui reprend les gens après Moi finit par gagner leur bienveillance bien mieux que le flatteur.» Celui qui reprend, il s’agit de Mochè. Adam, les gens, il s’agit d’Israël appelé ainsi selon le texte(5) :

«Et vous, mes brebis, brebis que je fais paître, vous êtes Adam, des hommes, moi, je suis votre D’ieu, dit le Seigneur D’ieu.» Après moi, le Saint béni soit-Il dit : [Mochè] les reprend pour les ramener à Moi. Il finit par gagner leur bienveillance, se rapporte à Mochè tel qu’il est dit(6) :

«Et certes tu as trouvé faveur à Mes yeux.» Bien mieux que le flatteur, il s’agit de Bil’âm. Israël, flatté par sa prophétie, l’orgueil s’empare de lui ce qui provoque sa chute à Chittim.

Autre explication.

Après Moi : qu’est-ce à dire? Mochè Me reprend à propos d’Israël, et il reprend Israël à mon propos. Il dit à Israël(7) :

«Pour vous, vous avez commis un grand péché!». Au Saint béni soit-Il, il dit(8) :

«Pourquoi, Seigneur, Ton courroux menace-t-il Ton peuple?». Que signifie pourquoi? S’adressant [à D’ieu], il dit : «Ce veau est bien car il pourrait t’aider. Le Saint béni soit-Il répond : En quoi m’aidera-t-il? Mochè reprend : Si Tu fais pleuvoir, il répandra la rosée. Tu libères les vents, il fera éclater les éclairs. Le Saint béni soit-Il dit alors à Mochè : Tu t’es laissé aussi berné par le veau? Et Mochè de répondre : Si tel est le cas, pourquoi, Seigneur, Ton courroux menace-t-il Ton peuple?.

Mochè dit à Israël :

«Pour vous, vous avez commis un grand péché.» A quoi cela fait-il penser? A un roi qui, irrité contre son épouse, la chasse hors de son palais. L’ayant appris, ses garçons d’honneur s’adressent ainsi au roi : Que diront les gens? Ainsi se comporte-t-on vis-à-vis de son épouse! Que t’a-t-elle fait? S’adressant à la femme, ils dirent : jusqu’à quand l’irriteras-tu? Ce n’est point la première ni la seconde fois [que tu te comportes ainsi]!»

Le Yalqout parle de l’importance du reproche. Il est vrai que la mitswa de reprendre son prochain est des plus difficiles à réaliser. Elle met en présence deux volontés libres qui s’opposent. L’un est en rupture d’équilibre moral. Il sait qu’il succombe au Yètsèr ha-râ. Il réalise que sa conduite n’a rien de raisonnable. Sa conscience le torture, mais il ne met aucun frein à sa mauvaise conduite.

Devant lui se dresse un homme qui lui confirme les reproches de sa conscience, reprenant à son compte les arguments du Yètsèr ha-tov, les paroles de la Tora et les enseignements des Hakhamimdes Maîtres.

Malgré les remords, malgré les reproches qu’on lui adresse, tout le problème réside dans son obstination. Peut-être faut-il, pour justifier le paradoxe de cette conduite, invoquer l’orgueil qui l’empêche de reconnaître sa faute, de reconnaître son erreur.

Mais nul ne peut s’inventer moralisateur, objecteur de conscience. Il faut une forte dose d’amour du prochain et de sagesse pour être en mesure de reprocher, réprimander et corriger. Reprendre le prochain ne doit, à aucun moment, viser à l’humilier, mais surtout l’amener à s’amender.

Aussi, le midrache désigne-t-il Mochè comme ayant accompli ce devoir à l’égard d’Israël dans l’unique but de les rapprocher de D’ieu et rétablir l’harmonie rompue entre Israël et D’ieu. Mochè, agissant ainsi, s’attire la bienveillance divine tout comme Israël, lui-même, qui finit par trouver grâce aux yeux du Créateur.

Mais Bil’âm, plutôt que de reprocher, flatte au contraire Israël. Il le bénit. Au lieu de se corriger, celui-ci conçoit de l’orgueil car, par les bénédictions, sa vigilance s’est endormie. Ce qui le pousse à s’unir aux femmes Midyanites, entraînant ainsi la mort de 24,000 âmes.

Par ailleurs, Mochè sut, en même temps qu’il reproche son fait à Israël, adresse des remarques justifiées à D’ieu à propos du Veau d’or. Commettre l’idolâtrie 40 jours à peine après la Révélation sur le Mont Sinaï, ressemblant ainsi à l’épouse qui commet une infidélité pendant ses noces, est une faute très grave.

Mais D’ieu est aussi responsable. En donnant en abondance l’or à Israël, que pouvait-il faire d’autre que de l’utiliser et fauter?

D’un côté, l’ingratitude d’Israël et son insubordination. De l’autre, la colère divine est injustifiée. Ce faisant, D’ieu accorde justement au veau d’or une importance.

Ailleurs, le Talmoud(9) met dans la bouche d’Agripas ces propos : «N’est-il point vrai qu’un héros se montre jaloux d’un autre héros, un sage d’un autre sage, un riche d’un autre riche?» Pour Mochè, le veau d’or ne devrait pas susciter tant de colère, ne méritant pas cette considération.

Certes, dans le cas du veau d’or, D’ieu se montre jaloux et intransigeant car, comme le précise Rabbane Gam’lièl, «Une épouse n’est jalouse que lorsque son mari l’abandonne pour une autre moins belle.» En tentant de rapprocher D’ieu d’Israël et Israël de D’ieu, Mochè s’attire la faveur divine.

Cependant le Yalqout poursuit :

«Ce sont là les paroles(10).» En vérité, les reproches devaient être adressés par Bil’âm et les bénédictions par Mochè. Mais si Bil’âm l’avait repris, Israël eût dit : un ennemi me reprend. Et si Mochè l’avait béni, les peuples de la terre eussent dit : son ami le bénit. Mais le Saint, béni soit-Il, s’est dit : que Mochè, l’ami, le reprenne et que Bil’âm, l’ennemi, le bénisse afin que les reproches et les bénédictions soient précis et clairs entre les mains d’Israël.»

Ce midrache est surprenant. Comment concevoir que Bil’âm haïssant Israël soit mieux indiqué que Mochè, l’ami, pour le corriger? N’est-il point vrai que le reproche vise avant tout une amélioration de la conduite morale? Bil’âm est-il en mesure de faire cela pour Israël?

Il est vrai que Mochè ne pose point de problème! Car pour Israël, il campe la personne la mieux indiquée pour adresser bénédictions ou reproches.

Mais quand bien même Bil’âm se contenterait de ne rapporter que les paroles divines, il n’en demeure pas moins que D’ieu se doit de tenir compte de la réaction des Bénè Yisraèl. Pour que le reproche atteigne son objectif, redresser le mauvais comportement des Bénè Yisraèl, il faut pour cela ne pas donner prise à son rejet.

De même pour que les nations consentent aux bénédictions divines réservées à Israël, pour qu’elles ne contestent point son élection, le meilleur moyen fut d’utiliser les services de leur propre prophète. Bil’âm doit donc bénir et Mochè reprendre pour parvenir, en fait, à un accord entre les Bénè Yisraèl et les Nations du monde. Israël ne conteste pas les reproches et les Nations ne remettent pas en question les bénédictions à Israël.

Mais si D’ieu devait arrêter son choix en fonction de l’amour et de la haine à l’égard d’Israël, il est évident que Mochè aurait été un meilleur choix pour les bénédictions, et Bil’âm pour les reproches.

Ce sont là les paroles que Mochè adresse à tout Israël en deçà du Yardène, dans le désert, dans la plaine en face de Souf, entre Parane et Tofèl, Labane, Hatsèrot et Di-Zahab.

Ce sont là les paroles que Mochè adresse à tout Israël.

Èllè ha-dévarimCe sont là les paroles.

Par définition, Èllè exclut tout ce qui précède. Ne compte que ce qui suit. Est-ce à dire que tout ce qui a été dit et rapporté dans les quatre autres livres sont nuls?

Le Midrache(11) rapporte :

«Ce sont là les paroles de Mochè : Les Bénè Yisraèl s’adressent ainsi à Mochè : hier, tu disais(12) :

«Je ne suis pas habile à parler» et à présent, tu parles sans cesse!

Rabbi Yitshaq dit : Si tu as des difficultés à parler, étudie la Tora et tu guériras. Mochè guérit car il avait étudié toute la Tora.»

«Rabbi Léwi dit également(13) : Mochè n’ayant pas encore reçu le mérite de la Tora, il est dit à son propos :

«Je ne suis pas habile à parler.» Mais l’ayant reçue, sa langue avait aussitôt guéri, tel qu’il est dit(14):

«Ce sont là les paroles de Mochè.»

Cependant, une difficulté surgit : pour quelle raison la langue de Mochè n’a pas guéri durant les quarante années où il a étudié et enseigné la Tora? Pourquoi, juste avant sa mort ainsi que le précise le texte(15) : «Or, ce fut dans la quarantième année le onzième mois.. Mochè s’adressa aux Bénè Yisraèl.»?

Rane répondra, dans la cinquième Dérachaétude, que Mochè avait toujours «la bouche pesante et la langue embarrassée.» Mais quand il s’adressait à Parô ou aux Bénè Yisraèl, les paroles sortaient aisément de sa bouche, claires et précises, parce qu’il est dit(16)«Je seconderai ta parole.» Tous se rendaient compte que c’était là un miracle, la parole venait donc du Saint béni soit-Il. Ainsi, lorsque Mochè parlait sans bégayer, cela signifiait que la Chékhina, la Présence divine, parlait par sa bouche.

Le Zohar(17) dit : «Le Saint béni soit-Il et sa Chékhina parlent par sa bouche.» Quand bien même il serait difficile pour une bouche de prononcer «observe et souviens-toi du Chabbat» en une seule parole, et pour une oreille à percevoir(18), il n’en demeure pas moins vrai que cela a été dit par Mochè. Car seules les deux premiers commandements AnokhiJe suis l’Ét’ernel, et Lo Yi-hyètu n’auras point d’autre dieu, ont été prononcés et transmis par l’Ét’ernel(19).

Mais aussitôt après avoir transmis les paroles divines, sa bouche reprenait son embarras et sa pesanteur. Cependant, arrivé au terme de sa vie, Mochè se mit à transmettre des enseignements personnels(20) comme les Tosséfot le précisent, alors sa langue s’est déliée et guérit.

Cela revient à dire que Mochè, dès la permission de rapporter dans son propre langage le livre de Dévarim, il cesse de bégayer. Sa langue guérit aussitôt qu’il eut le mérite de la Tora. La guérison est d’autant plus spectaculaire que les paroles adressées à Israël sont des reproches.

Ha-Dévarimles paroles.

Pour quelle raison avoir pris cette formule redondante? Il eût été préférable de dire tout simplement way-dabbèr Mochè èl kol YisraèlMochè parla à tout Israël!

A propos de la Tokhéha, la réprimande, le Sifrè et Rachi soulignent que, pour quatre raisons, il ne faut reprocher que peu avant la mort :

Pour ne pas être appelé à refaire souvent le même reproche.

Afin de ne pas gêner cet ami lors d’une rencontre par la suite.

Afin que l’on ne puisse pas penser que le motif du reproche est inspiré par l’animosité ou la haine.

Cette forme de reproche débouche nécessairement sur la paix.

Mais alors le Sifrè et Rachi recommandent-ils vraiment de ne pas accomplir la mitswa de la Tokhéha , , du reproche, pour laquelle il a été dit justement : reprendre le reproche même cent fois s’il le faut?

Il est vrai que ce sont là des paroles dures, des reproches virulents que Mochè adresse aux Bénè Yisraèl car chaque fois que l’on emploie dans la Tora dabbèr, il s’agit de parler durement.

Il passe ici en revue tous les endroits où Bénè Yisraèl se sont révoltés contre D’ieu. Ces reproches sont adressés à tout Israël, comme le stipule Rachi après le Sifrè et le Yalqout Chimôni, car Mochè voulait éviter la possibilité de contestation ultérieure.

Kol Yisraèl.

Est-il possible de parler à plus de 600 000 hommes à l’exception des femmes, des enfants et de tous ceux qui sont âgés de moins de 20 ans?

En les rassemblant tous, Mochè s’assure que nul ne peut, par la suite, dire : si j’avais été là j’eusse répondu ainsi. Agissant ainsi, Mochè souligne que quiconque a un argument à lui opposer pourrait le faire en présence de tout le peuple.

Èllè ha-dévarimce sont là les paroles de Mochè.

Ha-Réèm s’interroge sur l’explication de Rachi qui met ces reproches dans la bouche de Mochè autrement dit des reproches émanant de Mochè et non de D’ieu alors que plus loin, le texte(21) dit que «Mochè redit aux enfants d’Israël tout ce que l’Ét’ernel lui avait ordonné à son égard»?

Ha-Réèm lève la contradiction en soulignant que Mochè n’a adressé ses reproches à titre personnel qu’après avoir reçu l’ordre de l’Ét’ernel de le faire.

Cependant, le Maharal, dans son oeuvre Gour Aryè, précise que Mochè voulait justement adresser ses reproches. Mais pris de frayeur, l’Ét’ernel a apaisé ses appréhensions.

Ainsi dit le Midrache(22) :

«Mochè dit : parce que je leur ai dit(23) :

«Écoutez, ô rebelles!», j’ai eu pour mon compte! A présent, comment pourrais-je les reprendre? Le Saint béni soit-Il lui dit : Mochè n’aie crainte! Ainsi, sans la permission de D’ieu, Mochè ne se serait jamais avancé à adresser des reproches au peuple d’Israël.»

En deçà du Yardène, dans le désert, dans la plaine en face de Souf, entre Parane et Tofèl, Labane, Hatsèrot et Di-Zahab.

Mochè s’est adressé aux Bénè Yisraèl dans un lieu précis. Pourquoi citer tous ces lieux?

Le Midrache(24) rapporte que D’ieu demande précisément à Mochè de désigner les lieux et places où les Bénè Yisraèl L’avaient irrité. C’est pourquoi il est dit(25) : «Voici l’itinéraire des enfants d’Israël», c’est-à-dire de mentionner l’itinéraire, le cheminement moral des Bénè Yisraèl.

Ba-midbardans le désert.

Comme ils se trouvaient à Âr’vot Moab, le désert ici fait allusion à leur révolte dans le désert(26).

Ba-âravadans la plaine.

Il leur reproche l’acte d’idolâtrie de Baâl Péôr, . Étant à Chittim, à Âr’vot Moab, les Bénè Yisraèl furent séduits par les filles Moabites et Midyanites et entraînés à adorer leur divinité.

Face à Souf.

Mochè fait allusion à leur révolte près de la Mer Rouge et dans la Mer Rouge appelée Yam Souf(27), .

Entre Parane et Tofèl et Labane.

À Parane, ils ont critiqué la manne qui était blanche. Parane fait aussi référence à l’envoi des explorateurs et leur révolte.

Hatsèrot.

Mochè fait allusion à la révolte de Qorah. Les Bénè Yisraèl auraient dû tiré un enseignement du châtiment infligé à Miryam pour avoir médit de son frère et, par conséquent, ne pas se soulever contre Mochè.

Di zahav,

Il s’agit de la faute du veau d’or. En la mentionnant en dernier, cette faute est considérée comme étant la plus grave.

Il y a onze journées depuis Horèv, en passant par le mont Sèîr, jusqu’à Qadèche Barnèâ. Or, ce fut dans la quarantième année, le onzième mois, le premier jour du mois, que Mochè redit aux enfants d’Israël tout ce que l’Ét’ernel lui avait ordonné à leur égard.

Il y a onze journées depuis Horèv, en passant par le mont Sèîr, jusqu’à Qadèche Barnèâ.

Quel est le lien logique existant entre ces versets et le précédent?

Après avoir donc rappelé les plus graves fautes des Bénè Yisraèl, Mochè leur dit encore que le trajet de Horèv à Qadèche en passant par le Mont Sèîr qui prend normalement onze jours de marche a été fait en trois jours(28) pour souligner la gravité de leur conduite qui a été la cause de cette traversée du désert.

Mochè précise également la légitimité des reproches qu’il leur adresse. On ne peut à aucun moment condamner son incapacité de les conduire en Israël et par conséquent le fait de chercher, par les reproches, à détourner l’attention plutôt sur leur mauvaise conduite. Mais comme il ne leur reproche qu’après avoir conquis deux royaumes aussi puissants que ceux de Sihone et Ôg, alors nul ne pourra reprocher à Mochè une telle carence. Aussi pour cette raison la Tora précise-t-elle ÈllèCe sont là, les véritables reproches car ils visent principalement à corriger et à améliorer la conduite d’Israël.

Kéli Yaqar voit dans l’emploi de l’expression à tout Israël, l’indication que Mochè rappelait aux chefs d’Israël qui s’identifient en vérité à Israël et le représentent, la responsabilité qu’ils ont de reprocher à Israël en prenant soin d’utiliser la manière allusive qui, plus efficace, porte des fruits.

Hatam Sofèr donne une lecture différente de tous les lieux indiqués ici. Il rattache cette lecture à l’enseignement précisant que guéhinamenfer, a trois portes.

La première est dans le désertBa-midbar. Il s’agit de la jalousie. Ce travers est tellement fréquent dans la société que le jaloux arrive à faire d’un endroit habité un désert car rien ne lui convient, tout ce qu’il possède n’est rien à ses yeux face à ce que l’autre possède. Pour lui, le monde devient un désert.

La deuxième se trouve dans une société permissive qui admet, mixité et débauche. Elle est appelée Ârava qui dérive de taârovètmélange qui entraîne la déliquescence de la société. Ici le défaut est le désir.

La troisième est située dans la mer. Mol souf, fait allusion à l’orgueil et la recherche des honneurs. Les vagues de la mer, l’une chassant l’autre et tendant à se hisser plus que l’autre, font penser à l’orgueilleux qui tend à supplanter l’autre et l’écraser pour s’attirer les honneurs.

Là le reproche s’adresse clairement à tous ceux qui, par jalousie, désir et orgueil, travers responsables de la révolte de Qorah, de la faute du veau d’or et celle de la manne, avaient été coupables d’insurrection contre D’ieu et Mochè.

Par le reproche, la société a plus de chances de s’améliorer, de s’amender. Ce qui contribue à une véritable téchouvarepentir, qui débouche nécessairement sur une délivrance, guéoula, et la reconstruction du Temple.

1. Dévarim 1, 1 – 4.

2. Yalqout Chimôni sur Yirmiya paragr. 334.

3. Yalqout Chimôni, paragr. 795.

4. Michelè 28, 23.

5. Yéhèzqèl 34, 31.

6. Chémot 33, 12.

7. Chémot 32, 30.

8. id. 32, 11.

9. Âvoda Zara 55a.

10. Dévarim 1, 1.

11. Tanhouma sur Dévarim paragr. 2.

12. Chémot 4, 10.

13. Dévarim Rabba chap. 1, paragr. 1.

14. Dévarim 1, 1.

15. id. 1, 3.

16. Chémot 4, 12.

17. cf. Pinhas 232a.

18. cf. Roche ha-Chana 27a.

19. cf. Makkot 24a.

20. Méguila 31b.

21. Dévarim 1, 3.

22. Dévarim Rabba chap. 1, paragr. 6.

23. Bé-midbar 20, 10.

24. Tanhouma Massê, paragr. 3.

25. Bé-midbar 33, 1.

26. cf. Chémot 17, 3.

27. cf. Ârakhine 15a.

28. cf. Rachi et Taânit 29a.

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