La parole est un engagement

«Mochè parla aux chefs des tribus des enfants d’Israël, en ces termes : Voici ce qu’a ordonné l’Ét’ernel : si un homme fait un voeu à l’Ét’ernel, ou s’impose, par un serment, quelque interdiction à lui-même, il ne peut violer sa parole : tout ce qu’a proféré sa bouche, il doit l’accomplir. Pour la femme, si elle fait un voeu à l’Ét’ernel ou s’impose une abstinence dans la maison de son père, pendant sa jeunesse, et que son père, ayant connaissance de son voeu ou de l’abstinence qu’elle s’est imposée, garde le silence vis-à-vis d’elle, ses voeux, quels qu’ils soient, seront valables; toute abstinence qu’elle a pu s’imposer sera maintenue. Mais si le père la désavoue le jour où il en a eu connaissance, tous ses voeux et les interdictions qu’elle a pu s’imposer seront nuls. L’Ét’ernel lui pardonnera, son père l’ayant désavouée(1)

La sidra Mattote, s’ouvre sur les prescriptions relatives aux nédarim, voeux, et chévouôtserments.

La Tora met l’accent sur l’importance de la parole de l’homme. Chaque parole constitue déjà un engagement. Plus encore, lorsqu’elle est assortie d’un engagement ou une interdiction par voeu ou serment.

Cette importance est d’autant plus soulignée que la Tora envisage la possibilité, pour toute personne, de, désengagement, par une autorité compétente ou de, annulation, soit par le père ou par l’époux, pour la fille ou l’épouse. La parole prononcée par l’autorité compétente, le père ou l’époux agit si bien que le nèdèrvoeu, est annulé à la base.

Cependant il serait intéressant de trouver le lien logique qui relie Mattote, à Pinhas . À la fin de Pinhas il est dit(2) :

«Tels seront vos sacrifices à l’Ét’ernel lors de vos solennités, sans préjudice de vos offrandes votives ou volontaires, de vos autres holocaustes, oblations et libations et de vos sacrifices rémunératoires.»

En parlant d’offrandes votives, et d’offrandes volontaires,  nédava, le texte infère l’existence d’une telle possibilité sans toutefois informer de la possibilité de désengagement.

Il est permis de penser que Mochè était jusqu’alors la seule autorité qui procède au désengagement du voeu et à son annulation. Mais dans Pinhas, D’ieu lui annonce sa mort prochaine et son remplacement par Yéhochouâ. Mochè se fait donc un devoir d’enseigner les prescriptions concernant nédarim et chévouôt.

Le Midrache(3) citant le texte(4) :

«Mochè parla aux chefs des tribus. Si un homme fait un voeu à l Ét’ernel», rapporte : c’est précisément ce qu’exprime le verset(5) :

«Et si tu jurais par l’Ét’ernel vivant en vérité, en droiture et justice.» Le Saint, béni soit-Il, dit à Israël : ne pensez pas qu’il vous est permis de jurer par Mon Nom. Même à propos de la vérité, tu n’as pas le droit de jurer par Mon Nom. À moins que tu n’aies toutes les qualités [énoncées dans le texte](6) :

«C’est l’Ét’ernel, ton D’ieu, que tu dois révérer.

Que tu sois comme Abraham, Iyob et Yossèf réputés craignants D’ieu, –

Abraham tel qu’il est écrit(7) :

«Car désormais j’ai constaté que tu vénères D’ieu.»

Iyob(8) :

«Cet homme était intègre et droit, craignant D’ieu.»

Yossèf(9) :

«Je crains le Seigneur.». Voilà donc pour ce qui est «C’est l’Ét’ernel, ton D’ieu, que tu dois révérer

[Le texte poursuit]:

«C’est Lui que tu dois servir.»  Pendant ton étude de la Tora ou lors de la mise en application des mitswot, que ta principale occupation soit pour Le servir. Ensuite :

«attaches-toi à Lui seul.»

Mais est-il possible de s’attacher à la Chékhina, , la présence divine? N’est-il point dit(10) :

«Car l’Ét’ernel, ton D’ieu, est un feu dévorant»? C’est pour t’enseigner que le texte «attaches-toi à Lui seul» fait référence à celui qui donne sa fille pour épouse à un sage, étudiant la Tora et la Michena, lui installe un commerce et le fait profiter de son argent.

Si tu possèdes toutes ces qualités, tu pourras jurer, sinon ne jure point. Le roi Yannaï possédait deux mille villes. Toutes furent détruites à cause du serment à l’appui de la vérité. Pourquoi? S’adressant à son ami : Je jure de manger ou de boire à tel endroit, il s’y rendait pour se conformer à son serment. C’est pourquoi elles furent détruites. Et si en jurant à l’appui de la vérité, on s’expose à un tel châtiment, que serait-ce pour un faux serment?»

Ce midrache a pour objet de préciser la gravité du serment. Jurer par le Nom de D’ieu ne va pas sans ébranler les fondements de l’existence. Au moment où D’ieu avait prononcé «Tu n’invoqueras point le Nom de l’Ét’ernel ton D’ieu à l’appui du mensonge(11)», le monde s’est mis à trembler.

Il est, certes, possible d’admettre que jurer à l’appui du mensonge est interdit. Mais qu’advient-il de quiconque jurerait à l’appui de la vérité?

Faire un serment, pouvoir surtout invoquer le Nom de D’ieu, exige une conscience morale aiguë. En effet, le midrache fait appel à une autre prescription de la Tora(12) : «C’est l’Ét’ernel ton D’ieu que tu dois révérer, c’est Lui que tu dois servir, attaches-toi à Lui seul, ne jure que par Son Nom.»

Cet enseignement de la Tora passe en revue les qualités morales essentielles et requises pour que l’homme puisse, en cas de besoin, jurer par le Nom de l’Ét’ernel. Comment en effet un homme peut-il mesurer la gravité du serment s’il ne craint pas l’Ét’ernel?

Le craindre n’est pas chose simple. La crainte suppose avant tout la connaissance de D’ieu. Ce qui revient à apprécier Sa grandeur infinie, Sa sévérité autant que Sa bonté.

Le servir exige une soumission totale. Aucune prescription ne saurait être rejetée ou contestée. Peut-on effectivement imaginer un serviteur faisant un choix parmi les devoirs et obligations à remplir? Dès qu’il conteste une seule prescription, il perd aussitôt sa qualité de serviteur. Lorsqu’il prétend qu’une prescription ne répond pas à sa manière de concevoir les choses, il n’est plus serviteur de D’ieu mais son propre maître.

Attaches-toi à Lui seul. L’attachement à D’ieu est une qualité exigeant l’établissement de relations privilégiées avec ceux qui vouent leur vie à l’étude de la Tora et à l’accomplissement des mitswot. Ils sont les seuls à mériter son aide et à profiter de ses biens. C’est d’ailleurs l’unique manière de s’attacher à D’ieu, s’attacher à ceux qui aiment, servent et craignent D’ieu.

Seule une personne ayant satisfait à ces exigences pourrait jurer par le Nom de D’ieu.

L’exemple des 2 000 villes du roi Yannaï illustre bien que le fait même de jurer à l’appui de la vérité, dès lors que l’on ne dispose pas des qualités morales requises, ne va pas sans exposer le monde à l’anéantissement.

Abraham, Iyob et Yossèf soulignent combien un homme se doit d’éviter le recours au serment par le Nom de D’ieu, grand et redoutable. S’agissant de situations particulières où l’argent, bien matériel et périssable, entre en jeu, l’abstention de tout serment est absolument recommandé.

Tel Abraham, l’homme ne saurait viser rien d’autre que la crainte de l’Ét’ernel.

Tel Iyob, il lui faut assumer toutes les souffrances et privations.

À l’exemple de Yossèf, il doit maîtriser ses appétits et ses désirs.

Aussi, l’homme possédant de telles qualités, l’amour exclusif de D’ieu, l’assomption du mal et des souffrances, le contrôle des appétits, pourra-t-il, à la limite, si besoin est, jurer par le Nom de D’ieu.

Cependant, le Yalqout(13) reprenant cet enseignement, traite en premier de l’interdiction de faire des voeux :

«Voici ce qu’a ordonné l’Ét’ernel», il dit en substance : de même que Mochè prophétise par Ko,, ainsi les prophètes le font-ils également par Ko.

Mais Mochè a ceci de plus : Voici la parole, . C’est ce que le texte dit(14) :

«Tu ferais mieux de t’abstenir de tout voeu que d’en faire un et de ne pas l’accomplir.» Le Saint béni soit-Il, dit à Israël : Prenez garde aux voeux, ne les négligez pas, car quiconque néglige de les accomplir sera appelé à violer les serments, et quiconque est infidèle à son serment Me renie et par conséquent, ne mérite pas Mon pardon tel qu’il est dit(15) :

«Car l’Ét’ernel ne laisse pas impuni celui qui invoque Son Nom pour le mensonge

Un autre texte enseigne(16) :

«Et si tu jurais par l’Ét’ernel vivant, en vérité, en droiture et justice

Le Saint béni soit-Il dit à Israël : ne pensez point qu’il vous est permis de jurer par Mon Nom. Même à l’appui de la vérité, vous n’avez pas le droit de jurer par Mon Nom.»

Chaâr Bat Rabbim s’interroge à propos de l’absence du verset, «L’Ét’ernel parla à Mochè en ces termes», introduisant la recommandation d’une mitswa à Israël. À la place, il est dit Zè ha-davarVoici ce qu’a ordonné l’Ét’ernel.

Ce changement fait dire au midrache que la prophétie de Mochè est supérieure à celle des autres prophètes parce qu’elle s’identifie à la parole divine. voici, est à rapprocher du terme Zèhouteidentité. De cette différence qu’établit le midrache entre Koainsi, et voici, il est possible de déduire la grande importance de la parole.

Pour tous les prophètes, Ko indique que la parole divine est transmise, non pas identique à la parole de D’ieu, comme pour le cas de Mochè, mais telle qu’ils l’ont reçue et entendue.

La parole de Mochè sera, en revanche, claire, non soumise à une interprétation. Dans le cas des Nédarimvoeux, la Tora enseigne la possibilité d’annulation qui, pour un Maître ou un juge, cela ne peut se faire que par hattaradésengagement. Le père ou l’époux, ne peut utiliser que la hafaraannulation.

Si le Maître annule et le père désengage, le voeu ne serait pas pour autant annulé. C’est pourquoi dans ce texte, Mochè prend soin de nous avertir par  que sa parole émane de D’ieu et donc non sujette à interprétation.

Cependant, malgré la possibilité d’annulation des voeux, il n’est point conseillé à l’homme de s’habituer à prononcer des voeux car la violation des voeux entraînerait la violation des serments.

Mochè parla aux chefs des tribus des enfants d’Israël, en ces termes : Voici ce qu’a ordonné l’Ét’ernel : si un homme fait un voeu à l’Ét’ernel, ou s’impose, par un serment, quelque interdiction à lui-même, il ne peut violer sa parole : tout ce qu’a proféré sa bouche, il doit l’accomplir.

Mochè parla aux chefs des tribus des enfants d’Israël, en ces termes.

Ce texte appelle quelques remarques. Pour quelle raison Mochè s’adresse uniquement aux chefs des tribus?

La présence de la préposition, pour dans libnè Yisraèl,  est en plus. Ne serait-il pas plus correct de dire Rachè mattote bénè Yisraèl,  ?

Pour Rachi, en précisant aux chefs de tribus, Mochè entend surtout honorer les princes en le leur enseignant en premier à eux, ensuite à tous les enfants d’Israël. C’est ainsi qu’agit Mochè chaque fois qu’il doit transmettre les prescriptions que D’ieu lui ordonne.

Mais le texte le mentionne uniquement à propos de cette prescription pour enseigner que l’annulation des voeux pourrait être faite par un seul juge qualifié et approuvé et, en son absence, par trois juges même non qualifiés.

Toutefois, le fait même que cette prescription ne soit pas introduite par la formule consacrée : «L’Ét’ernel parla à Mochè en ces termes : parle aux chefs des tribus…» donne à penser que Mochè, avant sa mort, transmet son pouvoir en tant que seule autorité compétente à annuler les voeux aux chefs des tribus.

Libnè Yisraèl. Peut-être que Mochè ne se soit pas adressé uniquement aux chefs des tribus! Il est possible que ses propos sont dirigés également à tous les enfants d’Israël. Dans ce cas, il faut sous-entendre le waw conjonction de coordination : comme s’il était écrit Wé-libnè Yisraèlet aux enfants d’Israël.

Mais Or ha-Hayim, après avoir réfuté cette possibilité, invite à une lecture différente. Le Talmoud(17) précise que l’annulation des voeux et serments ne tient pas sur des bases solides pour souligner la difficulté que soulève l’obtention d’un désengagement. Aussi Mochè tient-il à n’informer, quant à la possibilité d’annulation, que les chefs des tribus qui sont en mesure de tenir compte de l’importance des voeux et serments ainsi que de la difficulté de s’en dégager.

En revanche, aux Bénè Yisraèl, enclins à négliger l’importance des nédarim et chévouôt, Mochè enseigne plutôt l’impossibilité de désengagement tel que précisé : «il ne peut violer sa parole».

Voici ce qu’a ordonné D’ieu,

  Est-il possible que Mochè puisse ordonner une prescription qui n’émane pas de D’ieu?

Zè ha-davar indique, certes, le niveau élevé de la prophétie de Mochè que nul autre prophète n’a pu atteindre. Il s’identifie à la parole divine. Sa prophétie ne procède ni par allusion ni par énigme ou songe. L’évidence constitue sa qualité essentielle.

Mochè se doit donc de rapporter fidèlement le message divin. Aussi le texte souligne-t-il la nature et la qualité de la prophétie de Mochè qui livre dans son intégralité la parole de D’ieu.

Or ha-Hayim, s’appuyant sur le midrache(18), rappelle que l’homme a le devoir d’éviter les nédarimet chévouôtles voeux et les serments, car bien que les ayant appliqués pour ne point être parjures, les sujets du roi Yannaï subirent leur châtiment.

Cependant, il existe certains voeux qui sont, en plus d’être permis, fortement recommandés. Il s’agit, pour lui, des voeux prononcés en vue d’échapper aux interdits d’impudicité. Pour se protéger contre les tentations des ârayotimpudicités, auxquelles fait allusion l’expression lèmor(19)en ces termes, l’homme pourrait prononcer des voeux et des serments. Bien mieux, il s’agit d’une mitswa. Aussi, pour cette raison, le texte précise-t-il :

Si un homme fait un voeu à l’Ét’ernel, ou s’impose, par un serment, quelque interdiction à lui-même

Il fait allusion à l’individu, pendant qu’il est homme, autrement dit en possession de ses forces, dont les désirs et les appétits l’incitent à succomber aux tentations des ârayot. Pour déjouer les projets du yètsèr ha-râ, le recours aux voeux et serments s’avère absolument nécessaire. Ainsi se comporte Boâz lorsque Rout se glisse furtivement dans sa couche : il jure par D’ieu vivant(20)pour calmer son yètsèr ha-râ(21)

Toutefois l’expression pléonastique à propos du voeu et du serment nécessite une explication. En effet, pour quelle raison répéter le substantif, quand le verbe, à lui seul, suffit?

Pour Or ha-Hayim, il existe deux catégories de voeu et de serment :

Au niveau de l’âme. Elle se subdivise en deux parties. L’action positive dont l’objectif est le bien, apprendre et enseigner, destiner ses biens aux choses sacrées, pratiquer la bienfaisance.

L’action négative visant à s’éloigner de tout mal, éviter la compagnie des malfaiteurs, être voisin d’une femme suspecte de mauvaises moeurs.

Au niveau du corps. Bien qu’elle intéresse des actes qui ne sont ni des interdits ni des devoirs, cette catégorie concerne des actes que l’on s’impose, manger tel aliment, boire telle boisson ou habiter tel endroit, et des actes que l’on s’interdit, ne pas manger etc…

Le texte encourage l’homme à suivre la voie de la perfection morale et, pour ce faire, il se doit de connaître la nature de son voeu ou de son serment. Car le voeu et le serment relatifs à D’ieu sont différents de ceux qui lui sont personnels.

Kéli Yaqar tente de définir la nature du voeu ou du serment. Pour lui, est voeu pour D’ieu lorsqu’il est exprimé en pleine possession de ses facultés, en toute conscience. Mais il est voeu profane dès lors qu’il est fait sous l’emprise de la colère ou simplement non en connaissance de cause.

S’interrogeant sur la répétition des termes :

ki yidor nèdèr, s’il prononce un voeu,

o hichabâ chévouâ, ou s’il prononce un serment,

lè-èssor issars’il s’impose une interdiction,

Rav Alchèkh précise que, généralement un voeu ou un serment étant prononcé sous le coup de la colère, l’intention de la Tora est d’enseigner aux Bénè Yisraèl de ne le prononcer que si l’homme se trouve confronté à une des deux situations.

Action préventive. Connaissant sa nature, l’homme s’interdit par voeu ou par serment un aliment ou une boisson afin de maîtriser le Yètsèr ha-râ. Ainsi, Chimône le juste, apprécie-t-il le comportement de ce jeune homme du Nèguèv qui, ébloui par sa beauté physique pouvant l’inciter à des débordements, prononce le voeu de nazirabstème, afin de s’interdire la consommation du vin.

Action curative. S’il constate, malgré les efforts déployés dans sa lutte, qu’il est sur le point de succomber aux tentations du Yètsèr ha-râ, le recours au nèdèr ou à la chévouâ est nécessaire pour échapper à son emprise. Tel fut le cas de Yossèf et Boâz qui, tous deux, avaient juré pour ne point fauter. C’est donc ce que Mochè enseigne aux chefs des tribus.

L’Ét’ernel est absolument contre la multiplication des voeux et serments qui ne visent pas l’attachement à D’ieu, ou l’interdiction par un serment de ce qui est déjà interdit afin d’échapper à l’emprise du Yètsèr ha-râ qui tend à le faire fauter.

Cependant, il eût mieux valu que l’homme ne fût point enclin à prononcer des voeux ou des serments. Seule sa parole proférée sans en avoir fait le voeu ou le serment aurait suffi. Le respect de sa parole est souligné car la parole à elle seule engage la personne.

Il ne peut violer sa parole : tout ce qu’a proféré sa bouche, il doit l’accomplir

Certes, la parole engage l’homme. S’il ne peut lui-même la violer, il a toujours la possibilité de consulter l’autorité compétente pour le désengager. Elle pourrait, le cas échéant, trouver l’ouverture, le regret en l’occurrence, pour annuler à la base et à la racine le voeu ou le serment.

Maor wa-chèmèche pose, quant à lui, une question fondamentale. Comment est-il possible qu’une autorité puisse annuler un voeu ou un serment après que l’auteur du voeu eut exprimé le regret de l’avoir fait?

L’homme ne pense, affirme-t-il, à faire un nèdèr que lorsqu’il se trouve dans un état de détresse. Et l’homme ne souffre qu’après s’être rendu coupable de mauvais comportement moral qui suscite la rigueur de middate ha-dinela justice stricte.

Pour échapper à cette rigueur et à cet état de détresse, l’homme doit réaliser un repentirtéchouva, parfait. La téchouva est pratiquement irréalisable à ce moment, l’homme étant sévèrement jugé.

Le sursis que procure le nèdèr lui est absolument nécessaire. Et, profitant de ce sursis, il est en mesure de procéder à une téchouva parfaite pour sortir de sa détresse.

C’est pourquoi, consultant l’autorité religieuse compétente qui, après analyse de la situation précédant le prononcé du nèdèr, le conduit à une prise de conscience de ses fautes, exprime des regrets sincères servant à annuler à la base même, le voeu. Cela n’est possible qu’avec l’aide du tsaddiqdu juste, qui insuffle dans le coeur de l’auteur du nèdèr, en plus des remords et regrets, la crainte de D’ieu afin de parvenir à l’harmonie et à l’équilibre moral.

Pour la femme, si elle fait un voeu à l’Ét’ernel ou s’impose une abstinence dans la maison de son père, pendant sa jeunesse, et que son père, ayant connaissance de son voeu ou de l’abstinence qu’elle s’est imposée, garde le silence vis-à-vis d’elle, ses voeux, quels qu’ils soient, seront valables; toute abstinence qu’elle a pu s’imposer sera maintenue.

La Tora prévoit pour la femme mariée et la jeune fille demeurant dans la maison paternelle, l’annulation par le père ou l’époux. Cette annulation n’est effective que si elle se produit le jour où le voeu est prononcé. Passé ce délai, ils ne sauraient intervenir.

De toute évidence, la Tora les investit de cette autorité car la jeune fille doit obéir à son père et la femme à son mari. Le texte insiste sur la notion de, annulation, pour bien indiquer que la femme ne saurait, sans l’autorisation du père ou de l’époux, prononcer un voeu.

Aussi le texte précise-t-il :

Mais si le père la désavoue le jour où il en a eu connaissance, tous ses voeux et les interdictions qu’elle a pu s’imposer seront nuls. L’Ét’ernel lui pardonnera, son père l’ayant désavouée.

Rav Hida, dans Homat Anakh sur la sidra, rapporte cet enseignement au nom de Rabbi Hayim Vital qui cite Rabbi Chimône Tirano :

«Quiconque ne viole point sa parole, autrement dit qu’il ne profane pas sa parole en n’en faisant pas un mauvais usage, par des propos futiles, tout ce qu’a proféré sa bouche, autrement dit toutes ses bénédictions s’accompliront. C’est ce que dit le Talmoud(22) à propos du verset(23) :

«Tu formeras des projets et ils s’accompliront en ta faveur.»

Les justes demandent, le Saint béni soit-Il accomplit, tel fut le cas de Rabbi Hanina Ben Dossa. Voici donc une définition originale du tsaddiq. Parce qu’il ne profane ni ne viole sa parole, le tsaddiq devient capable de dicter en quelque sorte sa volonté à D’ieu.

1. Bé-midbar 30, 2 – 6.

2. Bé-midbar 29, 39.

3. Bé-midbar Rabba chap.22, paragr. 1.

4. Bé-midbar 30, 2.

5. Yirmiya 4, 2.

6. Dévarim 10, 20.

7. Bérèchit 22, 12.

8. Iyob 1, 1.

9. Bérèchit 42, 13.

10. Dévarim 4, 24.

11. Chémot 20, 7.

12. Dévarim 10, 20.

13. in. Paragr. 784.

14. Qohèlète 5, 4.

15. Chémot 20, 1.

16. Yirmiya 4, 2.

17. Haguiga 10b.

18. Bé-midbar Rabba chap. 22, paragr. 1.

19. cf. Sanhèdrine 56b.

20. Rout 3, 13.

21. Nédarim 7b.

22. Chabbat 59b.

23. Iyob 22, 28.

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